Au Burkina Faso, la ville de Boulsa, chef-lieu de la province du Namentenga, région du Centre-Nord est inaccessible ce mardi 27 août 2024 sur l’axe Zorgho-Salogho-Boulsa. Pour cause, la montée des eaux du pont situé à la hauteur du village de Yargo, à une quinzaine de kilomètres de Boulsa. Les conducteurs des véhicules petit gabarit sont obligés de rebrousser chemin. Les intrépides prennent le risque de traverser avec l’aide des jeunes riverains qui en ont fait un business occasionnel. Seuls les gros porteurs peuvent prendre le risque de traverser sans gros soucis. Selon les dires des riverains, l’axe Pouytenga-Boulsa est pire et également inaccessible. En mission pour Boulsa, nous avons pu constater le calvaire de ces populations qui ont saisi l’occasion pour appeler les autorités à trouver une solution pérenne afin d’éviter ces problèmes à chaque saison des pluies.
Sur les lieux, le cours d’eau « Baguindin » qui traverse la zone était à un niveau 5. Mais à peine une heure d’attente et d’interrogations, le niveau est passé à 6 et continuait d’augmenter. Les voitures qui nous conduisent sont de petit gabarit et le risque est très élevé et le niveau d’eau continue de monter. D’autres sont pour la traversée avec l’aide des jeunes riverains qui insistent avec des paroles rassurantes. « Vous éteignez le moteur, vous montez pour que le véhicule soit plus lourd et nous, on se contente de vous pousser jusqu’à la sortie. On a déjà aidé une voiture même. C’est parce que certains d’entre vous ont peur sinon, il n’y a rien », tentent-ils de nous raisonner.
Malgré ces tentatives de nous convaincre, la décision est prise, pas de risque de traversée, d’autant plus que ces jeunes nous informent qu’un individu qui se filmait (selfie) est tombé et a failli être emporté par les eaux. Heureusement, la prompte réaction des jeunes sur place a permis de le rattraper à temps et de le sauver. « Si vous ne décidez pas maintenant, l’eau va continuer à monter et vous ne pourrez plus traverser » ajoute l’un d’entre eux.
Nous avons finalement décidé de rebrousser chemin et passer la nuit à Zorgho tout en espérant que le niveau de l’eau baisse au cours de la nuit afin de pourvoir traverser sans crainte le lendemain. Entre temps, trois camions traversent sans grosses difficultés. Connaissant nos conducteurs, l’un des chauffeurs de ces gros porteurs décident de nous aider à traverser afin que nous puissions effectuer notre travail qui devrait débuter le lendemain mercredi 28 août 2024 dans la matinée. Nous embarquons et traversons sans gros soucis. Mais nos deux chauffeurs sont obligés de passer la nuit à Zorgho en attendant que le niveau de l’eau baisse pour une traversée le lendemain.
Nous avons saisi cette occasion pour discuter avec les jeunes qui se sont fortement mobilisés pour aider les usagers. Dans cette aide, ils arrivent à se faire un peu d’argent avec des prix pour traverser qui se négocient entre 2000 FCFA pour les motos et 15 000 FCFA pour les voitures (ce qu’ils nous avaient proposé). Après d’âpres négociations, les femmes se font aider contre la somme de 1000 FCFA par personne.
Malgré les risques, Tinwendé Sawadogo, natif de Yargo et ses camarades sont sur place depuis le matin. Pour lui, c’est le même calvaire à chaque saison pluvieuse. « Il a plu hier soir, raison pour laquelle il y a beaucoup d’eau. Il y a un barrage pas loin d’ici qui est débordé et rend la voie inaccessible. Chaque année, c’est comme ça. A ce niveau même ça va, on peut aider les gens à passer. Il y a des moments même, on ne peut pas s’hasarder à rentrer dans l’eau au risque de se faire emporter facilement. C’est un risque de faire traverser les gens mais des fois, les gens ont des choses urgentes à faire, ne sachant pas quoi faire, nous sommes obligés de les aider pour qu’ils puissent traverser et aller vaquer à leurs occupations. Pour une moto, on fait traverser à 2000 FCFA mais avec les négociations, ça peut baisser. On aide certains même gratuitement », confie-t-il.
Il appelle les autorités à trouver une solution à travers notamment le bitumage de la voie ou la construction d’un vrai pont d’évacuation souterraine des eaux. « Nous demandons aux autorités de nous aider avec le bitumage de la voie pour faciliter l’accès à Boulsa. Au cas contraire, nous leur demandons de réaliser un pont pour permettre aux usagers de cette route de traverser sans difficultés en toute saison », interpelle-t-il.
Oumarou Sawadogo, tout comme les autres sur place, appelle les autorités compétentes à agir pour faciliter la circulation et désenclaver la zone
Même son de cloche chez Oumarou Sawadogo originaire de Boulsa. Selon ses confidences, le problème ce n’est pas seulement l’axe Zorgho-Salogho-Boulsa, il y a également l’axe Pouytenga-Boulsa, qui selon lui, est également inaccessible. A l’entendre, Boulsa est davantage enclavée par cette situation. Aussi, les évacuations urgentes sont de plus en plus compliquées. Il espère que ce cri de cœur parviendra aux autorités compétentes qui pourraient prendre des décisions pour soulager un tant soit peu leur calvaire.
« Pendant la saison pluvieuse, nous avons des difficultés à passer (axe Zorgho-Salogho-Boulsa). Sur l’axe Pouytenga-Boulsa, c’est le même calvaire. On ne peut pas traverser. Et par exemple, si on a des malades à évacuer urgemment à Ouagadougou, on ne pourrait pas. La zone est carrément enclavée. Si les autorités peuvent nous aider à arranger la voie, ça sera véritablement un ouf de soulagement pour les populations riveraines et tous les usagers de la route. C’est vrai que c’est un danger de traverser la voie avec toute cette eau mais comment va-t-on faire ? Si tu as un malade à évacuer, tu vas faire comment ? La population est là, elle ne sait pas à quel saint se vouer. Les jeunes s’organisent donc pour aider certains usagers à passer contre la somme de 2000, 3000, 5000 FCFA, etc. », explique-t-il.
Lefaso.net