Le parti Les Démocrates a effectivement déposé un recours contre madame Mariam CHABI TALATA, vice-présidente du Bénin pour des propos tenus à Allada, lors de la tournée gouvernementale de rédittion compte. L’honorable Guy Dossou MITOKPÈ est le requérant, et était accompagné dans la mission par l’avocat maître Renaud AGBODJO. Le recours a été déposé ce lundi 17 juin 2024, à la cour constitutionnelle. Lire l’intégralité du recours.
RECOURS EN INCONSTITUTIONNALITE
En application des dispositions de l’articles 42 nouveau de la loi N°2019-40du 07 Novembre 2019
portant révision de la loi N°90-32 du 11 Décembre 1990 portant Constitution de la République du
Bénin et des articles 23 et 34 de la Constitution du 11 Décembre 1990.
Cotonou, le 17 Juin 2024
A
Monsieur Le Président
de la Cour constitutionnelle
COTONOU
Monsieur le Président,
Le Parti Politique dénommé « Les Démocrates » ayant son siège à Cotonou au
quartier Fifadji Yenawa dans le 10ème arrondissement, lot 1863, parcelle V, agissant aux
poursuite et diligence de Monsieur Guy Dossou MITOKPE, Secrétaire national à la
communication, demeurant et domicilié ès qualité audit siège ;
Assisté par Maître Renaud Vignilé AGBODJO, Avocat au Barreau du Bénin dont
le cabinet est sis à Cotonou au quartier Jéricho, au Carré 794, Tél : 0022996530405, 01BP :
3141 Cotonou, mail : vignilor@yahoo.fr , au cabinet duquel domicile est élu pour les
présentes et les suites ;
A l’honneur de vous exposer que :
Le gouvernement béninois a initié et entamé effectivement une tournée nationale de
reddition de compte le 25 mai 2024.
A l’étape de l’Atlantique de ladite tournée, la vice-présidente de la République du
Bénin, Madame Mariam CHABI TALATA, a, dans sa communication, déclaré à Allada ce
qui suit :
« J’ai beaucoup apprécié l’intervention de la femme qui est à côté et qui a dit qu’au niveau
d’Allada, il vous manque de routes. Vous n’en avez pas suffisamment mais elle a ajouté quelque
chose. Si Talon ne fait pas cette route s’il le faut, on va le ramener pour un 3ème mandat… Cela
veut dire qu’elle sait qu’en dehors de Talon et de son équipe au Bénin, c’est rare de trouver des
bâtisseurs. Que si vous voulez des routes au Bénin, si vous voulez des écoles, si vous voulez que la dynamique en cours se poursuive, il faut des gens comme Talon, des gens de l’équipe de Talon.
Autrement, poursuit-elle, vous aurez quoi ? Ce qu’on a toujours eu : la politisation à outrance
de tout ».
Il ressort de cette déclaration que la vice-présidente appuie les propos d’une citoyenne qui
déclarait que si le chef de l’Etat n’arrivait pas à achever les projets prévus dans son programme
d’actions du gouvernement, il serait obligé à solliciter un troisième mandat pour les conduire à
terme.
Cette déclaration attentatoire à la démocratie
et à l’Etat de droit auxquels le peuple béninois
a solennellement affirmé son attachement à l’occasion de la Conférence des Forces Vives de la
Nation et même sur une question tranchée par une décision de la cour constitutionnelle est une
contemption déplorable à l’égard du principe de limitation du nombre de mandats
présidentiels en république du Bénin.
En outre, cette déclaration de la vice-présidente s’entrevoit comme une apologie manifeste
d’un 3ème mandat anticonstitutionnel au sens de l’article 42 nouveau de la loi N°2019-40 du 07
Novembre 2019 portant révision de la loi N°90-32 du 11 Décembre 1990 portant Constitution de
la République du Bénin qui dispose : « le président de la République est élu au suffrage universel
direct, pour un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois. En aucun cas, nul ne peut, de
sa vie, exercer plus de deux mandats de président de la République ».
Il résulte de ces dispositions constitutionnelles que la déclaration de la vice-présidente en
appui à l’avis d’une citoyenne est contraire à la constitution, car la constitution du Bénin limite
au maximum à deux (02) le nombre de mandats présidentiels en République du Bénin.
Un telle déclaration venant de la vice-présidente, une figure aussi importante du pays qui
devrait incarner l’adhésion scrupuleuse à l’ordre constitutionnel en vigueur au Bénin, est une
menace directe à la démocratie et à l’intégrité constitutionnelle du Bénin, jadis une référence en
démocratie au regard de son attachement aux valeurs et principes démocratiques.
Il sied de rappeler que le débat sur la limitation des mandats présidentiels est un sujet
sensible dans de nombreux pays africains, où des tentatives de prolongation de mandats
présidentiels ont souvent conduit à des tensions politiques et à des crises institutionnelles.
Par ailleurs, évoquant l’éventualité d’un troisième mandat pour le président Patrice Talon
dont la fin de son second mandat et dernier mandat constitutionnel est pour le 23 mai 2026, la vice-
présidente a non seulement violé les dispositions de l’article 42 nouveau de la constitution précité,
mais également les dispositions de l’article 34 de la constitution du 11 décembre 1990 qui
précisent : « tout citoyen béninois, civil ou militaire, a le devoir sacré de respecter, en toutes circonstances, la Constitution et l’ordre constitutionnel établi ainsi que les lois et règlements de
la République ».
Au surplus, l’article 23 de la constitution du 11 décembre 1990 précise : « toute personne a
droit à la liberté de pensée, de conscience de religion, de culte, d’opinion et d’expression, dans
le respect de l’ordre public établi par la loi et les règlements » ;
Il ressort de la lecture croisée et combinée de ces dispositions, que tout citoyen, vice-
président de la république fut-il, est débiteur d’obligation de respecter l’ordre constitutionnel et
public établi à tous égards.
Mieux, la liberté d’expression doit être usée dans le strict respect de l’ordre constitutionnel
et de l’ordre public béninois. Aussi, les mots et paroles qui résultent de l’usage de la liberté
d’expression ne doivent pas entraver l’ordre constitutionnel. A ce titre, il est constant dans la
jurisprudence de la cour que, l’ « usage de la liberté d’expression ne saurait constituer en lui-
même une violation de la loi mais seul le contenu de la parole peut être de nature à enfreindre
la loi y compris la loi constitutionnelle »
4
;
Dans le cas d’espèce, la vice-présidente, Mariam CHABI TALATA a royalement mépris les
dispositions des articles 23, 34 et 42 de la constitution en faisant l’apologie d’un éventuel 3ème
mandat anticonstitutionnel pour le président Patrice Talon presqu’en fin de son second et dernier
mandat constitutionnel.
En conséquence, il y a lieu pour la haute juridiction constitutionnelle de constater la
violation de la Constitution.
C’est donc au bénéfice de ses observations que le Parti politique « Les Démocrates »
sollicite qu’il plaise à la Cour de déclarer contraires à la Constitution, les propos tenus par
madame la vice-
présidente, Mariam CHABI TALATA à Allada le 25 mai 2024.
Pour le requérant
Guy Dossou MITOKPE