La question du fichier électoral soulevée par les partis politiques de l’opposition met au goût du jour les fraudes constatées dans la confection du fichier d’état civil à l’Anip. Quand on se sait que c’est ce document de l’Anip qui servira de socle pour les prochaines élections générales il y a de quoi se poser des questions. Depuis le 16 Novembre 2023, l’Ong Bénin Diaspora Assistance de Médard Koudebi alertait déjà sur les dysfonctionnements au niveau de l’Anip. Lire son alerte et ses recommandations.
ANIP-BENIN: MIEUX COMPRENDRE L’ORIGINE DES FRAUDES MASSIVES ET COMMENT CETTE RÉFORME DU PRÉSIDENT PATRICE TALON A ÉTÉ SABOTÉE
Lors de la première réunion à la présidence de toutes les entités sécuritaires concernées par l’élaboration de l’identification personnelle, plusieurs cadres ont été invités parmi lesquels le DEI d’alors le colonel DÈDO, Madame BOCOVO, Monsieur le DRI de l’époque le contrôleur général WANOU et le Directeur de l’Identité Judiciaire le commissaire Emmanuel TONOUKOUN. Tous ces cadres avaient été responsabilisés chacun dans son domaine afin que l’état aboutisse au résultat escompté et à cet effet, plusieurs ateliers ont suivi cette première rencontre à la présidence.
Malheureusement, lors de la phase pratique et principalement au début des enrôlements, personne jusqu’à ce jour ne sait pour quelle raison le directeur de l’ANIP d’alors Monsieur Cyrille GOUGBEDJI n’a pas accepté laisser la vérification de l’authenticité des documents avant leur sécurisation ni à la police technique et scientifique ni à l’identité judiciaire.
Une petite enquête au sujet de l’absence de la police technique et scientifique lors de cette phase pilote des réformes nous a permis de recueillir comme information, que la présence de la police dans l’équipe de l’ANIP aurait fait échouer la réforme, et que de plus, la banque mondiale qui contribue au financement aussi n’aurait pas donné son accord pour cette réforme. Cette absence de la police est aujourd’hui à l’origine de la catastrophe et des fraudes massives à l’ANIP. C’est ainsi qu’au début de l’avènement, la majorité des étrangers séjournant au Bénin pour des études, ou pour d’autres raisons ainsi que ceux en situation irrégulière ont tous profité des failles de cette réforme, en exploitant au passage la misère ambiante du pays. Ils se sont donc massivement rapprochés des femmes en difficulté financière non éligibles au microcrédit par manque de garantie d’une part, et de certaines familles en difficulté alimentaire d’autre part pour leur proposer de leur fournir copie de leur pièces d’identités afin qu’ils puissent refaire leurs actes de naissances dans leur pays de provenance. Il s’agit en termes clairs de mettre désormais les noms de ces femmes béninoises comme mères sur leurs faux actes de naissance afin de pouvoir profiter de la nationalité béninoise. Ces achats de mères misérables sur papier au Bénin leur ouvrent directement la voie pour le droit à la nationalité Béninoise au titre du droit de sang.
L’avantage pour cette fraude maternelle (à ces acheteurs de mère sur papier) leur a permis d’avoir facilement la nationalité béninoise ainsi que tous les avantages. Une fois le certificat de nationalité de la fausse mère établi, ces étrangers conservent toutefois leurs diplômes et leurs lieux de naissance initiaux afin de ne pas avoir de problème pendant leur cursus universitaire s’ils sont encore sur les bancs.
D’autre étrangers résidant au Bénin ont plutôt opté pour l’achat de faux actes de naissance Béninois avec pour lieux de naissance, n’importe quel ville du territoire béninois, ce qui leur permet d’avoir la nationalité béninoise au titre du droit de sol. Ces derniers, du fait qu’ils sont nés sur le territoire béninois sont automatiquement enrôlés par l’ANIP sur le fichier national de l’état-civil, ce qui leur procure le droit à la nationalité Béninoise. Malheureusement, ceux ayant déjà obtenu des diplômes universitaires dans leur pays d’origine avec pour lieu de naissance une ville authentique à celle de leur vraie identité et qui malicieusement se retrouvent aujourd’hui avec une nationalité Béninoise connaissent un blocage dans le cursus universitaire pour défaut de conformité.
Exemple : Nous avons aujourd’hui plusieurs cas de ressortissants de l’Afrique centrale dont l’un d’entre eux ayant obtenu déjà le Bac au Tchad, se retrouve aujourd’hui bloqué compte tenu du fait que sur le vrai faux passeport *{ N° 21 PP 43 781 }* de cet étranger non naturalisé obtenu le 28 décembre 2021, il est mentionné comme lieu de naissance Cotonou au Bénin, alors que sur son relevé de Bac, le lieu de naissance est TCHAD.
Il existe d’autres vrais Béninois réellement nés au Bénin, étant en quête de visa professionnel en direction de certains pays du Golfe mais frappés par le critère d’âge, qui sont allés refaire d’autres actes de naissance afin de diminuer ou augmenter leur âge selon le cas. Dans ce lot, certains sont même détenteurs d’anciens passeports et arrivent pourtant à se faire établir de nouveaux. Nos investigations à ce sujet nous ont permis de découvrir qu’il existe un mafieux réseau sur place par lequel ils font effacer leurs empreintes digitales pour empêcher le système de retrouver leur premier dossier.
Exemple: Nous avons l’exemple d’une fille née le 19 décembre 2003 à 07h10 min et bien enrôlée à l’ANIP, mais qui a réussi à obtenir un passeport { N° 21 PP 32 845 } le 17 novembre 2021, et ce, avec un deuxième faux acte de naissance portant comme date de naissance le 19 novembre 1998, soit une réduction de cinq (05) ans d’âge.
Les deux actes de naissance de 1998 et 2003 représentent la même personne. C’est ce que nous appelons les doublons. En cas d’élection à venir, l’algorithme va la sélectionner et la programmer dans deux bureaux de vote. Imaginez combien de doublons sont créés de la base de données de l’ANIP et les répercussions que cela engendrerait sur la liste électorale.
Exemple: Nous avons une autre dame de 48 ans habitant SEME-PODJI, laquelle pour des raisons de critère de voyage de travail domestique au Liban, a réduit son âge de 23 ans d’écart, s’est faite enrôler et a obtenu un passeport *{ N° 22 PP 49 796 } .
C’est dans le souci de sauver sa maman que son fils de 22 ans nous a contactés et nous lui avons donné les directives à suivre pour empêcher la sortie de sa maman du territoire. Comment peut-on avoir 25 ans pendant que son fils en a 22 si ce n’est pas la magie de l’ANIP ?
Certains politiciens professionnels de la fraude avaient l’habitude de faire voter nos voisins des villages des pays limitrophes (Burkina Faso, Nord et Sud Togo, Niger, et Nigeria) afin de gagner les élections. Pour ne pas perdre leurs électeurs lors des élections à venir, ils profitent à chaque nouvelle occasion pour enrôler ces étrangers des villages limitrophes de notre pays sur la base du faux témoignage. De plus, en cas de doute sur les mineurs présumés détenteurs de passeports béninois ayant des barbes jusqu’au bas-ventre, quand certains états demandent le test osseux afin de pouvoir définir leur âge réel, on se rend compte que les 23% des personnes testées ont bénéficié du faux en écriture administrative de l’ANIP au départ du Bénin.
Toutes les investigations faites nous ont conduits à une chaîne de complicités à tous les niveaux de l’appareil de l’État. Au niveau des mairies, au niveau des anciens CA ayant encore gardé leur cachet, au niveau de l’ANIP, au niveau du ministère de la justice qui délivre parfois les certificats de nationalités et des casiers judiciaires sur la base de faux documents et parfois au niveau de l’immigration qui essaie parfois quand elle n’est pas complice, de démêler certains vrais du faux. Malheureusement, lorsque l’immigration décide parfois de faire des investigations en cas de doute, certains proches du chef de l’état, membres du gouvernement et certains politiciens du parti proche du chef de l’état, mettent la pression sur les honnêtes agents parfois même avec des intimidations. Le Président PATRICE TALON qui n’est souvent pas informé de grand-chose est ainsi victime de l’abus de confiance de certains de ses proches.
Nous regrettons que l’ANIP après avoir enregistré des centaines de milliers de faux documents qu’elle sécurise décline aujourd’hui toute responsabilité y compris le faux témoignage non vérifié avant caution lors des audiences foraines. Mieux, concernant les béninois de la diaspora, vu que la loi avant la création de l’ANIP oblige tous les Béninois nés à l’étranger à aller faire une déclaration de naissance dans les consulats et ambassades dont dépend leur pays de naissance dans les 30 jours, pourquoi l’ANIP n’a pas exigé ce minimum qui est le récépissé de déclaration dans le délai raisonnable de 30 jours auprès des chancelleries de leur pays de naissance avant l’enregistrement ?
Pourquoi l’ANIP n’a pas laissé la police technique et scientifique ainsi que celle de l’identité judiciaire faire leur travail de vérification avant toute sécurisation ?
Jusqu’à quand allons-nous continuer les sabotages, la fraude à l’identité, à la nationalité et la délivrance des vrais faux documents d’identités en république du Bénin ?
Pour quel intérêt certains députés pour la mouvance présidentielle s’acharnent-ils à l’assemblé nationale sur le directeur de l’immigration juste parce qu’il fait son travail dans l’intérêt supérieur de la nation ?
RECOMMANDATIONS
Le Bureau de l’ONG remercie l’ensemble des magistrats et la police républicaine du Bénin pour ce difficile travail qu’ils font à la suite de nos dénonciations. Depuis le 05 septembre 2022 à ce jour, plus de 2.000 fraudeurs sécurisés par l’ANIP ont déjà fait l’objet d’interpellation parmi lesquels plusieurs centaines ont été déjà condamnées. En 12 mois de dénonciation, là où l’ancien directeur Cyrille GOUGBEDJI ne voyait aucune irrégularité et passait même sa vie en complicité avec ses journaux de proxénètes à nous diaboliser, nous avons réussi le pari de faire dénicher plusieurs faussaires. Toutefois, malgré tous les efforts pour sanctifier la base de données de l’ANIP, beaucoup de fraudeurs arrêtés et condamnés à la suite de nos dénonciations continuent toujours d’avoir dans la base de données de l’ANIP leurs faux documents sécurisés.
Nous recommandons purement et simplement un audit général et indépendant des fichiers de l’ANIP afin de pouvoir rattacher à chaque numéro CIP comment le titulaire est Béninois.
Qu’il soit exigé pour toutes les personnes nées à l’étranger, la fiche de déclaration à bonne date de leur naissance dans les consulats du Bénin à l’étranger ou à défaut, que l’état procède automatiquement à un test d’ADN entre le bénéficiaire et le parent Béninois exhibé sur tout acte de naissance étranger.
Que l’ANIP mette en place un système de radiation systématique des vrais faux documents, objets de condamnation déjà prononcés.
Quant aux autres qui ont acheté des dates de naissance avec pour lieu de naissance une ville béninoise pour se faire frauduleusement enregistrer à l’ANIP, il va falloir diligenter une minutieuse enquête sur leurs différents lieux de résidence depuis leur naissance en passant par leur cursus primaire, secondaire et universitaire au Bénin dans le but de mettre de l’ordre dans le faux que l’ANIP est en train de sécuriser aujourd’hui.
Paris , le 16 Novembre 2023
Cellule de communication de l’ONG BÉNIN DIASPORA ASSISTANCE